À première vue, la notion de élasticité des prix de la demande paraît assez raisonnable, voire aisément traitable. L’élasticité donne le pourcentage de variation de la quantité demandée en réponse à une variation d’un pour cent du prix.

En mettant de côté quelques situations étranges où une augmentation du prix entraîne une augmentation de la demande, dans la grande majorité des cas, l’élasticité est négative : la demande diminue quand le prix augmente.

La majeure partie de la littérature sur la tarification indique que l’élasticité des prix est une métrique très souhaitable, car, grâce à son analyse, il devient possible de calculer le prix optimal, c’est-à-dire le prix qui maximise la marge.

Cependant, en ce qui concerne le commerce, nous constatons que l’élasticité des prix est une métrique trompeuse, même lorsqu’elle est mesurée correctement - ce qui est également un défi de taille.

En effet, pour à peu près tout le commerce, la plupart des analyses d’élasticité tendent à montrer que les prix peuvent être augmentés sans impacter significativement la demande. Pire, si un test A/B à petite échelle est réalisé, le test confirmera l’intuition analytique fournie par l’analyse de l’élasticité.

Et pourtant, la conclusion est manifestement (fatalement) incorrecte.

La tarification est un signal envoyé au marché, et le marché est constitué d’habitudes. Seuls les acheteurs les plus sensibles aux prix font l’effort de vérifier systématiquement le prix de la concurrence. La plupart des acheteurs ne le font qu’occasionnellement.

Si votre commerce venait à augmenter tous ses prix de 20%, que se passerait-il pendant les 2 semaines suivantes ? Pour la plupart des commerces, pas grand-chose. Pourtant, en l’espace de quelques mois, les parts de marché déclineraient assez brutalement - à moins que ce changement de tarification ne s’inscrive dans une stratégie de rebranding complet visant à atteindre des segments plus aisés.

À court terme, la demande tend à être assez inélastique parce que les habitudes dominent. À long terme, c’est le contraire : il est presque impossible de maintenir un prix plus élevé que la concurrence si l’offre (produit + service) est identique.

D’un point de vue de tarification, il est important de ne pas se laisser tromper par une analyse quantitative à court terme. L’élasticité des prix est pertinente, mais par construction, elle présente une vision myope car elle ignore que le commerce est un jeu répété où l’objectif n’est pas de maximiser la marge de l’achat du prochain client, mais plutôt d’optimiser les parts de marché qui offrent les meilleures marges durables.