Tarification par pénétration

learn menu
By Gaël Grasset, July 2015

La tarification par pénétration est une méthode de tarification très agressive. Lorsqu’une entreprise utilise cette méthode, elle fixe d’abord ses prix à un niveau très bas (parfois même avec une marge négative) afin d’augmenter la demande des clients. Par la suite, l’entreprise augmente à nouveau le prix, espérant ainsi capter le même niveau de demande qu’avec ses prix antérieurement très bas.

La tarification par pénétration est souvent considérée comme une méthode de tarification opposée à gonflage de prix. Bien que très différentes par nature, ces deux types spécifiques de tarification semblent être les plus efficaces pour les nouveaux produits d’après Spann, Fischer et Tellis. Avec la tarification par pénétration, une entreprise espère fidéliser ses clients en vendant à un prix très bas au début, puis en augmentant le prix après un certain temps. De plus, avec le gonflage de prix, une entreprise cherche à maximiser son profit à long terme en capturant autant de surplus client que possible en fixant un prix relativement élevé au départ et en le réduisant par la suite.

L’efficacité de l’utilisation d’une stratégie de tarification par pénétration est étroitement liée à l’élasticité prix de la demande. Si la demande est très élastique, la tarification par pénétration entraîne un niveau élevé de demande lorsque les prix sont bas, mais ce niveau élevé chute considérablement lorsque l’entreprise décide d’augmenter ses prix. En revanche, baisser ses prix dans un marché élastique peut potentiellement être efficace si l’augmentation de la demande compense la perte de prix.

Principe économique

La tarification par pénétration repose sur une hypothèse principale : si le consommateur devient fidèle à une entreprise, la demande devient par conséquent moins élastique avec le temps. En conséquence, une entreprise accepte une perte de surplus lors des premières phases de la mise en œuvre de sa stratégie de tarification par pénétration, car elle doit vendre à un prix inférieur afin de capter des parts de marché supplémentaires. Les consommateurs deviennent progressivement fidèles à l’entreprise grâce à ce prix bas, et puisque la demande devient presque inélastique à long terme, l’entreprise peut ainsi augmenter ses profits en relevant par la suite le prix (pour une explication plus détaillée, voir notre article sur l’élasticité de la demande par le prix) et grâce à la fidélité acquise des consommateurs.

Cela peut être illustré graphiquement en deux étapes distinctes.

Premièrement, la baisse initiale des prix entraîne une perte de surplus économique à court terme, mais une augmentation de la demande.

La baisse initiale des prix entraîne une perte de surplus économique à court terme, mais une augmentation de la demande.

Deuxièmement, lorsque le prix est relevé à long terme (après la baisse initiale), on observe une augmentation évidente du surplus économique à long terme résultant d’un gain en fidélité de la clientèle.

Lorsque le prix est relevé à long terme (après la baisse initiale), on observe une augmentation évidente du surplus économique à long terme résultant d'un gain en fidélité de la clientèle.

Portée et exemples

La tarification par pénétration et le gonflage de prix sont deux stratégies de tarification à long terme opposées. La première consiste à fixer des prix bas au départ et à les augmenter au fil du temps afin de maximiser le profit à long terme, tandis que la seconde consiste à fixer des prix élevés au début et à les réduire par la suite.

Selon Spann, Fisher et Tellis, la tarification par pénétration est plus efficace que le gonflage de prix pour une entreprise nouvellement arrivée sur un marché concurrentiel et qui opère dans un segment industriel à bas prix. De plus, le produit ou service vendu par l’entreprise doit être capable de générer la fidélité des clients. Voici quelques exemples de ces types de marchés :

Services d’abonnement. Les services d’abonnement tels que la ligne téléphonique ou la télévision par satellite en sont de bons exemples. Le prix de ces services est souvent bas pour la première année, puis il est augmenté par l’opérateur à partir de la deuxième année. Dans ce cas, la première année de service est proposée au consommateur à un tarif de pénétration. Le prix de l’abonnement est relevé à la fin de la première année, et si le consommateur décide de conserver son abonnement, la demande pour ce service devient inélastique. Par conséquent, le fournisseur maximise ses profits à long terme.

Entreprises avec un modèle économique ‘appât et accroche’. Dans ce cas, une entreprise bénéficie de la vente de produits mutuellement dépendants afin de maximiser ses profits. Par exemple, les fabricants de rasoirs ont tendance à vendre les rasoirs à un prix bas, mais les recharges de lames sont proposées à un prix élevé. Deux autres exemples similaires du modèle « appât et accroche » sont les imprimantes (et les recharges de cartouche) ainsi que les consoles de jeux (et les jeux vidéo qui les accompagnent par la suite).

Prix haut-bas. Alors qu’une entreprise peut fixer des prix bas pour certains articles de son catalogue afin d’attirer des clients, le reste des biens reste généralement à des prix élevés. Dans ce cas, l’entreprise mise sur le fait que les consommateurs se rendent d’abord dans ses magasins (ou sur ses sites web, etc.) pour les articles moins chers, mais finissent par acheter à la fois des produits à bas et à hauts prix. Pour illustrer, Walmart utilise des tactiques de prix haut-bas pour attirer des clients dans ses magasins. On peut même dire qu’elle utilise des tactiques de prix d’appel, car tandis qu’elle vend certains de ses produits à perte, d’autres produits plus onéreux génèrent des profits considérables.

Références

  • Dean J., “Pricing policies for new products”, Harvard business review, 1976
  • Spann M., Fischer M. & Tellis G. J., “Skimming or penetration? Strategic dynamic pricing for new products”, 2014